Jordanie, grimpe dans le Wadi Rum

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Le massif du Wadi Rum en Jordanie est une destination incontournable pour l’escalade que nous sommes allés découvrir avec Mélanie au mois de novembre.

Situé dans le sud du pays c’est un massif désertique fait de montagnes en grès aux formes très particulières, de dômes, profonds canyons et parois raides.

Rocher sculpté typique

L’escalade ici est unique au monde et incomparable. Le grès qui constitue ces montagnes est de solidité et de couleurs très variables, allant du rose au noir en passant par le rouge cuivré. Toujours très sculpté, les formes sont étonnantes ce qui rend l’escalade variée et très intéressante. On est ici dans du pur terrain d’aventure car l’équipement en place est peu abondant, on se protège la plupart du temps sur coinceurs et lunules et la recherche d’itinéraire est souvent de mise. C’est un rocher où l’on « réapprend à grimper » car il est parfois fragile et ultra abrasif ce qui implique de grimper en douceur et de faire très attention au tirage dans les longueurs comme dans les rappels. Mais c’est ce qui fait le charme de l’escalade qui demande de s’adapter à chaque type de roche que l’on peut trouver dans le monde !

Chacun trouvera son bonheur et aura du plaisir en venant faire de la montagne et grimper dans le Wadi Rum. Les voies normales ou « voies bédouines » sont extrêmement intéressantes et requièrent un pied montagnard et un grand sens de l’itinéraire mais pas des grandes qualités de grimpeurs. Tandis que les voies en terrain d’aventure dans le 6 peuvent être de vrais « chantier » bien engagés ! Il existe sinon énormément d’itinéraires dans le 4 et le 5 qui débouchent sur des sommets au panorama incroyable. Et cerise sur le gâteau nous n’avons croisé que très peu de monde dans les voies, et seulement dans celles équipées de relais et descendant en rappel.

Pour notre part nous nous sommes fait autant plaisir, Mélanie en second que moi en tête, dans des voies jusqu’au 6a, car l’escalade demande souvent de la concentration et n’est jamais ennuyeuse même dans le facile !

Le séjour a commencé avec une jolie petite voie d’échauffement « Goldfinger » faite l’après-midi après avoir roulé depuis la capitale Amman.

Nabatean Route

Le lendemain Omar notre hôte local nous a déposés en 4×4 de l’autre côté du Djebel Rum pour en effectuer la traversée. Nous nous retrouvons alors seuls dans le désert au pied du plus haut sommet de la Jordanie et partons pour une longue journée en montagne. Nous montons par la voie normale « la voie Nabatéenne », qui démarre dans un immense canyon, un  « siq » comme on dit là- bas, puis prend ensuite une grande vire qui raye une paroi très raide. Là on peut observer les gravures des ancêtres Nabatéens qui ont peuplé le pays il y a plus de 2000 ans. Puis l’itinéraire va suivre une succession de petits canyons, dalles, marches faciles et dômes jusqu’au sommet, jamais dur mais du terrain où il faut être tout le temps vigilant. Le panorama du sommet est saisissant, nous sommes entourés par le désert et par des montagnes rouges à perte de vue !

La course est loin d’être terminée car la descente par « Hammad’s route » sur le village est aussi longue que la montée et très intéressante ! Du sommet on se demande vraiment par où l’on va passer tellement cette montagne est vaste et compliquée! Mais finalement en suivant le topo et en cherchant bien on découvre l’itinéraire qui va nous faire descendre des dalles impressionnantes en désescalade, tourner et retourner autours de dômes et faire des rappels dans un immense siq qui nous ramène droit sur le village. Au final la traversée du Djebel Rum est une superbe course en montagne où pendant 8h on est constamment en train de chercher son chemin et où l’on fait de l’alpinisme en baskets !

The Beauty

Après cette belle journée nous prévoyons une voie d’escalade plus classique en fissure « the beauty ». C’est une ligne qui ressemblerait plus aux fissures d’Utah car le rocher y est plus lisse qu’ailleurs mais l’escalade est superbe. L’approche et la descente par les canyons de Rakabat et Kharazeh est fantastique aussi.

Pilier de la Sagesse

Nous grimperons ensuite le  « Pilier de la Sagesse » un magnifique itinéraire montagne de 400 m très homogène dans le 5b/c. L’escalade est toujours belle, assez engagée, il n’y a presque rien dans les longueurs et beaucoup de relais sont à construire, la retraite y serait très compliquée. On grimpe juste au-dessus du village rythmés par le chant du muezzin ! La descente se fait par la partie basse de Hammad’s route que nous avons parcourue 2 jours plus tôt. Nous sommes donc sereins car c’est toujours 2h de descente compliquée qui nous attendent à la sortie du pilier.

Nous avons bien mérité une journée de détente à la mer Rouge située à 45 minutes de route pour couper la semaine !

Omar vit avec sa famille à Rum où il nous a accueilli de façon exceptionnelle et c’est un plaisir de prendre les repas du matin et du soir dans sa famille en découvrant la cuisine et la vie locale. Ce bédouin est aussi guide sur place et il est toujours de bon conseil, connaissant pas mal de voies et nous faisant les approches en 4×4 à travers le désert.

Nous enchainons ensuite avec une voie très classique « Merlin » une ligne de fissure de 160m en 6a, très raide mais au rocher extrêmement sculpté ce qui la rend plus abordable. Il y a aucun équipement dans les longueurs et il faut bien gérer le matériel mais les relais sont en place et la voie se descend en rappel. Le temps est menaçant aujourd’hui et le tonnerre suivi des premières gouttes commence alors que nous jetons le premier rappel. Nous croisons une cordée peu inquiète qui continue de grimper alors que nous nous dépêchons de fuir vers le sol. Et c’est une bonne idée, car à peine nous le touchons, un déluge s’abat sur la montagne transformant rapidement la ligne de fissure en une immense et dangereuse cascade. Les deux grimpeurs resterons bloqués une bonne heure sous la cascade puis finalement tout se calme et ils regagnent le sol sain et sauf mais avec une bonne frayeur !

Barrah Canyon

Le temps revient au beau, les torrents s’arrêtent aussi vite qu’ils sont apparus et nous profitons de l’après-midi pour traverser le canyon d’Abu Iglakhat et retrouver Omar de l’autre côté dans le désert.

L’arche de Burdah

Nous choisissons une voie facile mais sauvage pour le lendemain « Orange Sunshine » bien agréable en 4-5, vierge de tout équipement où nous prenons la ligne la plus logique mais qui pourrait passer un peu partout ! Nous montons ensuite au sommet de Burdha par une arête facile puis redescendons par la fameuse Arche très photogénique puis la voie normale, là aussi bien paumatoire et très intéressante.

Pour notre dernier jour dans les montagnes du Wadi Rum nous voulons aller au sommet du Nassrani, un sommet compliqué d’accès car l’un des rares à n’avoir jamais été grimpé à l’époque par les bédouins, pourtant bien audacieux, il a donc fallu attendre les premiers grimpeurs européens à la fin des années 80 pour le gravir. « Hiker’s Road » est une voie d’Albert Precht, fameux grimpeur autrichien qui a été très actif dans la région et a ouvert nombreuses voies engagées de grande ampleur.

Hiker’s Road

Cet itinéraire est incroyable car il déjoue une immense face très raide en utilisant des lignes de faiblesse logiques et de façon astucieuse. Cela en fait au final une très belle voie assez engagé de 400m en 5c-6a max au caractère bien « montagne » qui demande une solide expérience du terrain d’aventure, la cotation globale n’étant pas à prendre à la légère. Le panorama au sommet est une fois de plus mémorable et la descente en rappel aussi ! Elle s’effectue en partie dans la voie puis dans un profond canyon très étroit, les rappels sont impressionnants et bien propices au coincement de corde jusqu’au dernier. Au final c’est encore une grosse journée de 9h et c’est heureux que nous reprenons le chemin du village avec un beau coucher de soleil en prime pour saluer notre visite au Wadi Rum !

coucher de soleil Wadi Rum
Coucher de soleil sur le Wadi Rum

Après un dernier repas chez Omar nous roulons pour passer la nuit à Petra, que nous visiterons le lendemain suivi de la mer Morte et du retour dans les Alpes.

Et c’est des images plein la tête que nous nous remémorons ce voyage, une fantastique destination que chacun peut découvrir à son niveau, où les photos parleront mieux que les textes !